Cours d’ethnomédecine de Christian Busser, docteur en pharmacie et en ethnologie
(référence : LICENCE 3 Semestre 6 Parcours Ethnologie UFR SSPSD / 2020 SO20FM51, ethnopharmacologie de 12 heures) les mercredi de 16 à 19h aux 4 dates suivantes : Me 17.3, 24.3, 31.3, 7.4.2021 (évaluation écrite pour les étudiants en ethnologie mercredi 7.4 de 18 h à 19h) en salle 3213 au-dessus des amphithéâtres.
Ouvert au public
Département d'Ethnologie 22 rue Descartes à Strasbourg (Esplanade) ; l’accès se trouve à l’arrière du bâtiment « Le Patio » (entrée principale).
Cours 4
D. Médecine populaire dans les Vosges : une thérapeutique populaire européenne exemplaire ; représentations et théories
1. Les trois principales théories de la connaissance des remèdes( hors techniques chamaniques étudiées ailleurs): la théorie des essais et des erreurs ; la théorie des signatures; l'observation des animaux.
2. L’apport de la linguistique dans la connaissance de la maladie et des remèdes
3. Cosmogonie populaire et médecine populaire : transferts du celtisme au christianisme dans les campagnes, exemple de la fête welche de tchenivrer
4. Structures corporelles
5. Représentations des fonctions vitales
6. Les conceptions de la maladie
3 premiers chapitres
voir thèse en ethnologie de Christian Busser (linguistique ch1.8; 6.8. et 6.9; théorie des signatures: 6.5.4 et 6.5.9, sur l'exemple du millepertuis: 2.1.2.75; transferts du celtisme au christianisme 6.5.11) et "Les plantes des Vosges" ainsi que :
LEVI-
Les noms des plantes, Lucien Guyot et Pierre Gibassier, PUF N°856, 1960
chapitres 4 et 5 et 6
voir chapitre 6.10 thèse de Christian Busser; le diabète 4.5.2; 6.2 techniques de guérison
Glossaire thématique du parler welche édité par la Société d'histoire du Canton de Lapoutroie Val d'Orbey, 1998, p.28-
Nos paysans d'antan, une leçon de vie, synthèse ethnologique de la population welche d'une vallée alsacienne, Jean Paul Patris, Jérôme Do Bentzinger éditeur, 2005.
LAPLANTINE F. (1978)La médecine populaire des campagnes françaises aujourd'hui, Delarge Ed. Paris .
Linguistique, exemples de taxonomie populaire:
Cosmogonie populaire et médecine populaire:ch 6.5.11 et caractéristiques anthropologiques, croyances, et cosmogonie chez les welches: ch 6; synthèse de la fête de tchenivrer:
Conception de la maladie, voir aussi la synthèse dans les lignes suivantes à partir de l'oeuvre de Claudine Herzlich:voir par exemple site destiné aux infirmières: ( la maladie destructrice, la maladie "libératrice, la maladie "métier"): http://www.serpsy.org/formation_debat/diagnostic/representations.html
Santé et maladie sont vécues et pensées par l'individu en référence à ses rapports avec la société ; par la santé et la maladie, l'individu s'insère dans la société contraignante ou en est exclu.
La maladie est une forme de déviance motivée par les pressions de la société sur l'individu. Le " rôle " du malade, c'est-
C'est à travers l'activité du bien-
La maladie " destructrice "
Elle apparaît marquée par deux critères principaux :
Le sujet qui se reconnaît malade ressent l'inactivité, l'abandon de son rôle comme une violence qui lui est faite. L'inactivité signifie en plus la destruction des liens avec les autres, l'exclusion, la solitude. La personne malade ne peut créer les liens qu'elle souhaiterait, elle n'est pas une partenaire valable, elle n'a rien à offrir à l'autre. Les problèmes financiers renforcent encore ce sentiment d'inutilité sociale.
Même malade, la personne persiste dans une conduite de santé. Il s'agit d'assurer pour l'individu la permanence de sa fonction sociale, conserver l'identité, essentielle entre elle et lui. L'individu se situe tout entier dans un univers social, comme personnalité identifiée à son rôle social qui exige la santé et rejette la maladie (cf. La métamorphose de Kafka.).
On déclare l'inactivité insupportable mais on déprécie les quelques activités permises au malade ; elles ne peuvent constituer un palliatif. Presque toujours lié à l'inactivité apparaît le thème de la dépendance à autrui. De même que l'inactivité est insupportable pour ces personnes, la dépendance leur est pénible. L'aide est malaisément acceptée. Il ne peut en fait pas y avoir d'aide, le malade est seul au milieu des autres.
Seul au milieu des bien-
Alors que l'inactivité, la dépendance et l'exclusion sociale apparaissent au sujet comme insupportables et destructrices, il n'y existe pas dans la
maladie de solution : inactif et exclu de la société des bien-
On comprend donc aisément l'apparition sous diverses formes de sentiments d'angoisse qui culminent dans l'expression de thèmes d'anéantissement. La maladie, c'est le néant, c'est un terme, c'est la mort.
Nous voyons en quel sens la maladie peut être " destructrice " : la destruction, l'anéantissement, la mort ne sont pas la conséquence de la maladie, un danger pour l'avenir, mais sa réalité immédiate. C'est dans sa vie même que le malade est anéanti et sans avenir, c'est dans sa vie même qu'il est comme mort. La mort est alors psychologique et sociale avant d'être organique. La destruction menace la personnalité encore plus que le corps.
Le malade se décrit comme diminué, perd ses qualités de sociabilité, d'énergie et d'indépendance. Il se transforme. Il est " moins qu'avant ".
Il régresse au statut passif et dépendant de l'enfant. Certains décrivent une véritable dépersonnalisation, on n'est plus soi-
La relation qui s'établit entre l'individu et la maladie peut se formuler en terme de pouvoir. Dans la conception " destructrice " de la maladie, le sujet oscille entre nier sa maladie (donc être tout puissant à son égard) et une impuissance totale.
L'individu maintiendra son activité le plus longtemps possible. Il refusera les soins, le recours au médecin, il refusera de " savoir ", de s'informer sur son état.
Et si la maladie s'installe et dure, le dernier pas est franchi, le malade est vaincu par la " vraie " maladie. La passivité prend alors le pas sur la négation. On refuse l'anéantissement en se transformant en objet. On refuse le " personnage " que crée la maladie par l'ultime affirmation : ce n'est pas " moi " qui suis malade.
La maladie " libératrice "
Pour certaines personnes, la maladie est " libération ". Comme pour la maladie destructrice, tout commence par l'inactivité. Mais, le sujet la
ressent cette fois comme l'allégement des charges qui pèsent sur lui. Tel est le sens qu'il donne au repos. On insiste sur la rupture d'avec les contraintes sociales, sur " l'effacement du
quotidien ", voire de la réalité elle-
Il est deux conceptions de la maladie libératrice :
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La désocialisation du malade est également présente mais elle prend dans cette conception un sens opposé : l'exclusion de la société est assumée non comme destruction, mais comme libération et enrichissement de la personne. Le malade, loin d'être anéanti, retrouve des possibilités de vie et de liberté.
On insiste alors sur les possibilités d'activités intellectuelles permises par la levée des obligations sociales, on accorde à la solitude un caractère bénéfique, on dépeint enfin le pouvoir, voire les privilèges que donne la solitude de malade. La personne ne trouve pas dans le vie en société la satisfaction de ses besoins et ses aspirations. Elle s'affirme comme distincte de son rôle social. La vie en société n'est pas la vraie vie que seule la maladie révèle.
La personne du malade se dessine alors selon trois directions :
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L'enrichissement prend parfois la forme d'une plus grande " ouverture " à autrui.
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Sur le plan du comportement, les examens, les soins, les relations avec le médecin ne sont pas l'essentiel, tout au plus indique-
L'attitude des autres apparaît ici déterminante. Si la maladie (donc la désocialisation) est acceptée par l'entourage, une conception positive de la maladie peut d'élaborer. Mais lorsque l'attitude des autres cesse d'être favorable, lorsque la maladie n'est plus tolérée par l'entourage mais ressentie comme une lourde charge, son caractère bénéfique s'estompe.
La maladie " métier "
La maladie peut apparaître enfin comme un métier. La fonction reconnue au malade est de lutter contre la maladie. Elle possède certains caractères d'un métier ; elle se prépare et s'apprend.. La maladie apparaît comme la situation où l'on a recours au médecin et où l'on se soigne. L'accent est donc mis d'emblée sur la lutte active du malade. C'est grâce à la libération des charges de la vie quotidienne que l'individu trouve l'énergie nécessaire à la lutte contre la maladie. Comblée par cette lutte, l'inactivité devient acceptable.
La conception de la " maladie-
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Dans la maladie-
C'est dans cette conception que la perception et donc l'intégration dans le concept de maladie, des phénomènes organiques est la plus complète. La douleur, la fatigue, voire même la température font partie de l'image de la maladie et servent à la définir. L'action, la lutte supposent la connaissance : l'atteinte est donc davantage perçue à son niveau corporel. La perception de la maladie est donc parallèlement plus différenciée : loin de l'envisager comme phénomène global (comme dans la maladie destructrice) ou de se limiter à quelques types de maladies (maladie libératrice), les malades utilisent maintes qualifications, opèrent de plus nombreuses distinctions, apprécient avec nuances, caractéristiques et types de maladies.
Une " forme " de santé est ici prépondérante : celle du fond de santé. Elle est d'abord le signe d'une " participation " plus grande " de l'individu à son état, elle atteste qu'il se sent concerné dans son corps. Il est surtout le facteur principal de résistance à la maladie. Nous retrouvons sur ce plan le thème fondamental de la conception : d'une part l'acceptation se double d'une perception plus fine de l'atteinte corporelle, d'autre part la lutte de l'individu, son pouvoir se manifestent sur un double plan : psychologique, par le " moral ", la " volonté ", par le " fond de santé ".
C'est dans la maladie-
L'image du malade fondée sur l'activité, sur la participation à la situation de malade perd alors son caractère dramatique.
L'expérience de la maladie perd aussi le caractère exceptionnel et la valeur bénéfique qu'on lui accordait dans la maladie libératrice. La personne en sort renforcée.
Dans la bouche des sujets, être " un malade " devient alors une catégorie sociale à l'égal des autres. Le monde des malades est un monde socialisé.
La maladie-
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Maladie et santé ne sont pas hétérogènes : elles s'incluent dans un même ensemble. La conduite du malade est le processus par lequel non seulement on répond à l'atteinte organique mais encore, on affirme la permanence de son appartenance à la société.
Qu'est-